Les Maitres et Elèves par ordre alphabétique
Alain de SAINT-EXUPERY
Locksmith
Craft National Living Treasures 2008
Le parcours d’Alain de Saint Exupéry n’est pas classique. Issu d’une famille de viticulteurs, il débute des études d’ingénieur en mécanique tout en sachant très tôt que c’est le travail de la main qui l’attire. Il choisit l’ébénisterie. « j’aimais l’idée que l’on est chef d’orchestre dans ce métier. On est au centre de compétences qu’il s’agit de coordonner et cela me passionnait », explique-t’il. Il apprend sur le tas chez des artisans parisiens, encore relativement nombreux dans la capitale à la fin des années soixante. La restauration de meubles anciens le conduit très vite à intervenir sur des serrures dont la clé était perdue ou le mécanisme endommagé. Il se souvient alors de ses études de mécanique qui s’avèrent utiles pour ce travail.
Pourtant, lorsqu’il inaugure son propre atelier en 1976, dans la propriété familiale en Dordogne, c’est vers le bois qu’il se tourne. « En marqueterie, on utilise du bois scié de1,4 à 2,2 mm d’épaisseur et j’avais remarqué qu’il devenait difficile de s’approvisionner ». cet artisan ingénieux répare alors une vieille scie du XIXème dîtes « au bois montant » et adjoint à l’atelier cette activité de sciage en placage de bois d’essence nobles tout en poursuivant la restauration des meubles et, nécessairement, des serrures. Aujourd’hui, ce travail est devenu son activité principale. Alain de Saint Exupéry n’a pourtant pas le sentiment de travailler, c’est une passion qui grandit de jour en jour. « Je béni Dieu, déclare-t’il, c’est un cadeau du Ciel de pratiquer ce métier ». même après des décennies, l’émotion est intacte au moment de faire fonctionner « en douceur » une serrure ancienne. Découvrir l’intérieur d’un meuble resté fermé durant un siècle après avoir recréé une clé est un moment toujours aussi intense pour cet homme qui a eut à intervenir sur de véritables chefs-d’oeuvre. Il aime particulièrement les défis : « Il nous arrive d’avoir du mal à comprendre la complexité de certaines serrures, surtout quand celles-ci sont inachevées. Mais elles restent des créations humaines et tout ce que les hommes font, d’autres peuvent les décrypter ».
Sa recherche de l’excellence qui l’a fait être en 1996 coopté pour intégrer l’association des Grands Ateliers de France, n’a d’égale que sa volonté de transmettre ; à son fils, lui aussi doué pour la mécanique (il s’est spécialisé dans l’horlogerie ancienne), mais aussi au public. L’atelier du château du Fraysse ouvre continuellement ses portes aux visiteurs : compagnons en formation, antiquaires, conservateurs de Musée, collectionneurs privés et néophytes curieux à l’occasion, par exemple, des Journées du Patrimoine.
Cet engagement pour la perpétuation du métier et son sens du partage n’ont pas échappé au Jury des Métiers d’Art 2008. Conseillé par ce dernier, la ministre de la Culture, Christine Albanel, lui a attribué le titre de « Maître d’Art », l’équivalent du titre japonais « Trésor National Vivant ». « J’en suis fier, mais ce titre ne changera pas ma vie. En revanche, il donnera de l’élan à tous nos métiers de la main et c’est ce qui est, à mon sens, le plus important », conclut’il.